Jean-Luc Salomon, l'étoile filante

 

Jean-Luc Salomon au départ du GP de Formule France 1969Charade 1969 : Jean-Luc Salomon au départ du GP de Formule France qu'il va gagner / Photo collection privée

 

Il y a tout juste 50 ans, le 28 juin 1970, le pilote clermontois Jean-Luc Salomon perdait la vie sur le circuit de Rouen-les-Essarts lors d’une course de Formule 3. Il venait de décrocher un engagement chez Lotus et s’apprêtait à disputer son premier GP en Formule 1 sur le circuit de Charade.

 

 

 

Jean-Luc Salomon, athlète de demi-fondJ.L. Salomon, Athlète / photo X

 

Jean-Luc Salomon avait toujours rêvé de devenir pilote de course, mais c’est en tant qu’athlète qu’il se fit remarquer. Né en 1944 à Saint-Cloud dans les Hauts-de-Seine, il s’imposa rapidement comme l’un des meilleurs espoirs de l’athlétisme européen. Son palmarès est aujourd’hui éloquent : Meilleure performance européenne junior sur 1500 m en 1962 à l’âge de 18 ans, record d’Europe 1500 Steeple junior en 1963, victoire devant Michel Jazy sur 1500 m sur la célèbre piste de Saint-Maur en 1965… et au total 14 sélections internationales. Le monde de l’athlétisme tenait à l’époque son nouveau champion, mais devenir le « nouveau Michel Jazy » n’était pas son objectif. Jean-Luc Salomon voulait à tout prix devenir pilote. A 23 ans il délaissa les pointes pour la pédale d’accélérateur avec son aura de champion de la cendrée, mais conscient d’une certaine forme d’urgence. Il savait pertinemment que les résultats devaient arriver très vite car dans le milieu auto on débute jeune et la place au sommet est souvent éphémère. Pour cela il avait anticipé sa reconversion avant même d’arrêter sa carrière en s’installant à Clermont où il avait intégré la Manufacture Michelin comme « essayeur pneumatiques », une manière d’être au contact permanent avec le milieu automobile et de montrer ses capacités à rouler vite avec tout type de voitures.

 

Le coup de pouce du secrétariat d’état

 

J.L. Salomon au volant de sa Martini Formule France jaune et rouge / J.L. Salomon au volant de sa Martini Formule France jaune et rouge / Photo X

 

Le secrétariat d’État à la jeunesse et aux sports avait repéré le talent de Jean-Luc Salomon. Il lui attribua deux bourses qui lui permirent de suivre des cours de pilotage sportif à Magny-Cours. Compétiteur doué il remporta en 1968* le concours organisé au sein de l’école, le fameux« Volant Shell », qui avait pour but de détecter puis de former de jeunes pilotes, aux courses sur circuits. Le vainqueur gagnait une saison en championnat de France de Formule 3. Jean-Luc Salomon au volant d’une Martini jaune et rouge participa au championnat de Formule France 1969 et gagna les deux premières courses sur les circuits d’Albi et de Pau. Il du mettre sa saison entre parenthèses le temps de récupérer des séquelles d’un banal mais sérieux accident de la route. Il revint sur l’autodrome de Montlhéry terminant 3ème puis à domicile, à Charade, où il accéda à la plus haute marche du podium.

 

La Lotus qu’il ne pilota jamais

 

A l’image de Jean-Louis Trintignant dans « Un homme et une femme », en tant que pilote essayeur, Jean-Luc Salomon participait, durant les saisons hivernales, au Rallye de Monte-Carlo sur DS (Michelin étant à l’époque propriétaire de Citroën). En 1970, il du abandonner sur accident tout comme la crème des pilotes de l’époque : Andruet, Vinatier, Piot (copiloté par Jean Todt) pour ne citer qu’eux. Quelques semaines plus tard il s’installa dans le baquet d’une Martini pour la saison de Formule 3 obtenue grâce au « Volant Shell ». Dès les premières courses il montra ses capacités à être l’un des meilleurs pilotes du plateau se battant avec fougue aux avant-postes. Dans les paddocks, le talent du jeune pilote auvergnat en étonnait plus d’un, à commencer par Colin Chapman, constructeur et fondateur de l’écurie Lotus. Ce dernier peaufinait alors la mise au point de la célèbre Lotus 72**, voiture auréolée de trois titres de champion du monde pilote avec Rindt et Fittipaldi et trois titres de champion du monde des constructeurs. Le Britannique voyant en Jean-Luc Salomon un futur grand champion, lui proposa un volant au sein de son écurie et surtout de débuter à l’occasion du GP de France de F1 programmé cette année là sur le circuit de Charade. En à peine deux ans, l’ancien champion d’athlétisme se retrouva au top niveau, réussissant son pari de rattraper le temps perdu. Comme il n’était pas question pour lui d’abandonner en cours une saison F3 qui avait bien démarré, il honora son engagement et se présenta sur la ligne de départ du Circuit de Rouen-les-Essarts.

 

La folle course du 28 juin

 

En ce dimanche d’été, la course se révéla totalement folle. Le plateau était particulièrement relevé dans cette catégorie avec Fittipaldi, Jarrier, Wollek, Dayan. Âprement disputée de bout en bout, les pilotes prirent beaucoup de risques pour rester dans le «wagon de tête». Au 13ème tour Bob Wollek accrocha un concurrent et sorti violemment de la piste. Un tour plus tard Denis Dayan sur Grac, sans doute victime de sa mécanique, fit un tout-droit d’une grande violence. Il décédera 2 jours plus tard à l’hôpital. La course continua malgré tout. Dans le dernier tour, cinq pilotes se présentèrent dans le virage de la scierie, prêts à tenter le tout pour le tout afin de décrocher la victoire. Jean-Luc Salomon était dans ce « paquet ». Sa Martini accrocha une autre voiture, décolla et retomba dans un effroyable choc. Inanimé, il fut transporté au centre médical du circuit où les médecins ne purent que constater son décès.

 

Le temps des héros

 

J.L. Salomon et D. DayanJ.L. Salomon et D. Dayan tous deux victimes de cette terrible course du 28 juin 1970 / Photo X

 

Jean-Luc Salomon rêvait de devenir pilote, il le fut. Se hisser parmi les meilleurs, il y parvint. Mais l’histoire ne retient que peu de chose de cette parenthèse enchantée qui dura à peine deux ans. Pourtant son charisme et son coup de volant n’ont jamais été oubliés par les pilotes de l’époque. Jacques Laffite ou Henri Pescarolo peuvent en témoigner. Dès qu’ils évoquent ces années héroïques et au combien dangereuses, le jeune pilote clermontois est bien présent. A une semaine près, il aurait pu entrer par la grande porte dans l’histoire du sport auto. La mémoire collective retient les « morts au combats » de la Formule 1 : Jo Schlesser, François Cevert, Patrick Depailler et Jules Bianchi, elle retient ceux qui ont sauvé leur peau et en oublie leurs palmarès mais qu’importe. Le destin de Jean-Luc Solomon en avait décidé autrement. Son âme repose en paix à Magny-Cours, à quelques encablures du circuit qui le vit se révéler et de l’atelier où l’on construit toujours des monoplaces Martini.

 

*En 1968, c’est Jacques Laffite qui avait remporté le « Trophée Winfield » une épreuve parallèle qui offrait aux pilotes jugés talentueux une seconde chance s’ils n’avait pas gagné le Volant Shell.

 

**En 1970 la Lotus 72 est au couleurs du cigarettier Gold-Leaf avant de prendre l’inoubliable livrée Noir et Or « JPS ».

 

Article d'Olivier PERROT paru dans 7 Jours à Clermont




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